La vallée des loups
J’avais vu le précédent film de Jean-Michel Bertrand, « Vertige d’une rencontre » sur sa quête alpine de l’aigle royal, qu’il voulait filmer dans son milieu naturel sans pour autant le déranger. De là est née, semble-t-il, l’idée suivante, celle de filmer le loup dans son milieu naturel, toujours, évidemment, sans le déranger. Ainsi ce film, « La vallée des loups », à la diffusion nationale en salle, contrairement au précédent à la diffusion confidentielle dans quelques salles alpines, montre qu’il a gagné son pari. Et malgré le fait que disant cela je lève un coin du suspense, l’intérêt du long métrage n’est évidemment pas là. C’est donc l’histoire de la quête d’un homme, un peu obnubilé, et légèrement obstiné, au milieu de la nature sauvage des montagnes des Alpes du Sud. C’est la quête d’un animal sauvage réapparu de lui-même dans la paysage français il y a une vingtaine d’années, qui fait autant parler de lui qu’il est difficile à apercevoir. L’opiniâtreté de Jean-Michel Bertrand finira évidemment par payer, comme je vous l’ai dit, mais je reste admiratif de la quantité d’énergie et de patience qu’il lui a fallu d’une part pour transporter un paquet de matériel de cinéma dans la montagne et d’autre part (et surtout !) pour passer des heures, que dis-je, des journées, des semaines, dans la montagne, enfermé dans une tente minuscule fouettée par les éléments, souvent dans le froid, à se faire le plus discret et invisible possible pour tenter de comprendre cet animal, pour essayer de le voir et surtout de le filmer, chez lui, sans le déranger.
Je voulais aller voir ce film en avant-première à Embrun pendant que j’y étais, en y emmenant ma fille et ses cousins, mais nous sommes arrivés trop tard au cinéma, la salle était déjà pleine. Déception. Comme je voulais y emmener ma fille, nous avons dû y aller un week-end où nous étions dans les parages, c’est-à-dire dimanche dernier ; la projection la plus proche était dans le Pathé du centre commercial de Belle Épine à Thiais. Il y a avait une longue queue devant les caisses, et malgré nos vingt minutes d’avance, nous fûmes juste à l’heure dans la salle. Heureusement (ou plutôt malheureusement) les nombreuses personnes — et enfants — là ce maussade dimanche après-midi ne venaient pas voir ce merveilleux film. Qui faisait d’ailleurs figure d’ovnis dans la vaste programmation du multiplexe. Peu de monde dans la salle, en fait. Contraste avec Embrun. Pourtant Jean-Michel Bertrand était sur France Inter la veille, dans « CO2 mon amour ». Ma fille était la seule enfant. Dommage (pour les autres). Contraste flagrant avec la série de pubs et de bandes annonces qui assénèrent pas mal de violence en vingt minutes (comme si plus de douze euros la place n’était pas suffisamment cher, il fallait en plus se coltiner des pubs !) . Des images que j’aurais préféré que ma fille ne voit pas. Mais visiblement, quand on va voir un documentaire naturaliste, il faut aussi se payer les extraits du dernier thriller... Le fait que des enfants puissent venir voir ce film n’a vraisemblablement pas percolé dans le cerveau des personnes qui ont choisi les bandes annonces. Ou peut-être que si, mais les arguments économiques et marketings sont alors probablement passés avant l’intérêt des enfants, comme souvent.
Toujours est-il qu’après cette bouffée de bruit et de fureur, le film nous immerge dans un monde de calme et de volupté, dans une nature loin des vicissitudes quotidiennes. Le spectateur peut respirer, enfin. Une nature qui n’est pourtant pas le moins du monde exotique, c’est une nature que je connais bien, puisque dans le même coin que celle où j’ai grandit et où je retourne, ponctuellement, avec plaisir. Mais elle est là avec un regard différent de celui que je lui porte, avec des images superbes, paysages et bestioles en tout genre, sans compter cette aventure pourtant simple, mais essentielle, que nous relate Jean-Michel Bertrand en même temps qu’il la vie.
Et ma fille a bien aimé, elle est restée scotchée sur son siège pendant un bon moment au début. Seule la fin lui a paru un peu longuette.
Le retour à la réalité à la fin, en sortant de la salle, a été un peu brusque. Je vous suggère plutôt d’aller voir ce film dans un petit cinéma de quartier ou d’art et essai. Le côté temple de la consommation était un peu... trop ! Même si nous avons traversé le-dit temple au petit trot pour rentrer au plus vite moyennent quelques embouteillages au passage !
Guillaume Blanc
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