Les tribulations d’un (ex) astronome

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Le réchauffement climatique, il est là !

samedi 5 octobre 2013 par Guillaume Blanc

Le réchauffement climatique, on en parle beaucoup, enfin on en parlait beaucoup, mais avec la crise, vous savez, on a d’autres chats à fouetter. De fait la publication du 5e rapport du GIEC fin septembre est passée complètement inaperçue dans la sphère médiatique. Faut bien dire ce qui est : ça ne fait plus recette. Tant que les chercheurs sont d’accord entre eux et ne s’étripent pas, les media s’en foutent royalement.

Pourtant, crise ou pas crise, media ou pas media, le réchauffement climatique est bel et bien là. Et quand je dis là, c’est là, ici, chez nous quoi.

Donc, le réchauffement climatique, c’est tout simplement, bêtement, l’augmentation de la température moyenne. Ce qui se traduit par une augmentation du nombre de journées estivales (quand la température dépasse les 25°C) ou une diminution du nombre de jours de gel.

Évolution du nombre annuel de journées estivales à Toulouse et Paris depuis 1951

On constate ainsi, en moyenne, 4 à 5 jours de températures estivales de plus tous les 10 ans dans l’hexagone.

Évolution du nombre annuel de jours de gel à Toulouse et Nancy depuis 1951

Et donc 3 à 5 jours de gel en moins, en moyenne, tous les dix ans. L’hiver cède peu à peu la place à l’été. C’est triste, quelque part.

En revanche il n’y a pas plus d’occurrences de pluies diluviennes depuis 50 ans... Toujours ça de gagné.

Sinon, et bien ce changement climatique a des conséquences largement observables sous différentes facettes.

Le Glacier Blanc, reflet de lui-même

Les alpinistes qui arpentent la montagne l’ont sous les yeux depuis belle lurette : les glaciers fondent. La Mer de Glace se rétracte un peu plus chaque année nécessitant de nouvelles échelles pour atteindre le Montenvers ; la langue du Glacier Blanc se retrouve loin dans les barres, alors que quand j’étais gamin, le chemin passait juste devant la bouche béante du torrent qui s’en écoulait... Le niveau des glaces baisse donc, des longueurs d’escalade supplémentaires apparaissent, tandis que des glaciers disparaissent purement et simplement. Outre la décoration cristalline qu’ils apportent aux cimes sur lesquelles ils s’accrochent ce sont encore de fabuleux réservoirs d’eau douce. Pour combien de temps ?

Par ailleurs, le permafrost fond, des montagnes s’écroulent, des voies historiques disparaissent ainsi à jamais rattrapés par la pesanteur — il n’en reste que poussière. Quand le Cervin — « merveilleux tas de cailloux » branlant — va-t-il passer l’arme à gauche ?

En moyenne montagne, pas de glaciers, mais c’est l’enneigement qui subit les conséquences des hausses de températures. Ainsi au site nivo-météorologique du col de Porte en Chartreuse,les mesures régulières de températures et hauteurs de neige sont sans appel : il fait plus chaud, et si les précipitations ne varient pas ou peu, en revanche, la quantité de neige diminue significativement depuis 50 ans.

Durée d’enneigement au col de Porte

Il faut donc aller de plus en plus haut pour skier. Les stations de ski ne le savent que trop bien.

Bref, le réchauffement climatique, c’est le quotidien du montagnard, en définitive.

Mais alors, pour le reste de la population ? Et bien, il est là aussi, le réchauffement climatique. En m’inspirant d’un article au graphisme évocateur du numéro 327 (septembre 2013) d’Alternatives Économiques, en voici quelques exemples.

La mer monte. Par exemple à Brest, depuis le début du XXe siècle le niveau de l’océan par rapport à la côte a grimpé de 10 cm !

Moyenne annuelle du niveau de la mer à Brest depuis le début du XIXe siècle (source : Permanent Service for Mean Sea Level)

Les amateurs de nature franciliens et autres grimpeurs parisiens le constatent également, le réchauffement climatique : leur terrain de jeu dominical, les blocs de la forêt de Fontainebleau, est de plus en plus envahi par les chenilles processionnaires du pin. Celle-ci remonte l’hexagone à la faveur des températures toujours plus clémentes au nord.

Expansion de la processionnaire du pin dans le sud du Bassin Parisien. © Inra, URZF

Les tiques qui infestent les hautes herbes de la forêt principalement au printemps semblent également se régaler du réchauffement climatique...

Donc si je résume, plus chaud, moins froid, autant de pluie, beaucoup moins de glaciers, donc moins de réserves d’eau, moins de neige en moyenne montagne, des mers dont le niveau monte inexorablement (y’en a qui vont regretter de ne pas avoir respecté la loi littoral !), des espèces nuisibles qui prolifèrent. L’avenir qui se dessine sans rien faire n’est pas des plus roses...

Enfin, pour finir quand même sur une note un peu plus guillerette, le réchauffement climatique pourrait quand même faire des heureux. Tous les dix ans environ, les chenilles d’un papillon, la tordeuse du mélèze, deviennent tellement nombreuses qu’elles consomment la majorité des aiguilles et réduisent fortement la croissance des mélèzes. Le mélézin prend une teinte brunâtre, en berne. Des chercheurs suisses analysant les cernes de croissance des arbres, ont reconstruit la fréquence de ces attaques par la tordeuse depuis 1200 ans. En 2007, ils démontrent que les dernières décennies ont vu la disparition de ces attaques régulières, pour la première fois en plus d’un millénaire. La même équipe, en collaboration avec des chercheurs américains et norvégiens, suggère en 2011 que le réchauffement climatique en est la cause. Les tordeuses se développent de manière optimale à des températures qui étaient avant le réchauffement récent aux altitudes où les mélèzes sont abondants (environ 1500 m). Aujourd’hui, cette zone optimale se retrouve plus haut (au-delà de 2000 m), là où les mélèzes sont rares ou absents, et la tordeuse ne peut donc plus atteindre de fortes densités. Il reste maintenant à savoir si c’est le cas partout dans les Alpes, pourquoi les populations de tordeuse sont aussi dépendantes de la température, et les conséquences sur les forêts de mélèzes. Toujours est-il que les mélèzes à la sublime parure variant de couleur au rythme des saisons seraient ainsi débarrassés de cette bestiole qui les rongeait périodiquement. Grâce au réchauffement climatique.


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