Un film d’anticipation du réalisateur sud-coréen Joon-Ho Bong fort intéressant, sorti en septembre 2013 et présentant un futur post-apocalyptique, ou une illustration du remède pire que le mal. 2014, une solution est trouvé au réchauffement climatique... le CW-7. Épandu dans la haute atmosphère, il provoque immédiatement un refroidissement un peu trop drastique de la planète, anéantissant toute vie. Un reliquat de l’humanité se réfugie dans un train qui parcourt la planète sur une voie unique, en une année [1] [2]. L’histoire se passe dix-sept ans plus tard, en 2031. Le train tourne toujours autour d’une planète surgelée. Il est hiérarchisé avec la « noblesse » dans les wagons de tête, et les « pauvres » dans les wagons de queue. On découvre au fil du film que les riches mangent correctement, se divertissent et ont de la place, tandis que les pauvres sont entassés les uns sur les autres, qu’après s’être entre-dévorés ils mangent une espèce de gélatine protéinée, dont on se rend compte qu’elle est fabriquée à partir de bestioles dans le genre cafards. C’est présenté de manière répugnante, mais finalement ce n’est pas bien pire que de manger des crevettes en gelée...
Donc le point de départ, c’est la nième révolte des pauvres, qui sont violemment ostracisés par les riches. Maintenus à l’écart de la luxure. Chacun à sa place sociale. Sauf qu’au bout d’un certain temps ceux qui n’ont pas accès aux privilèges ont envie de l’avoir. La révolte gronde, sommeille avant d’éclater. Un leader charismatique, et le tour est joué.
Une révolté fomentée par le chef suprême du train et son allié insoupçonné en queue de convoi, dans l’unique but de réguler une population qui ne peut croître dans l’espace réduit disponible. Donc une petite révolution de temps en temps, ça ne peut que faire du bien : ça élimine la base pour faire de la place.
Évidemment, celle-ci, de révolution, va plus loin que les précédentes (sinon il n’y aurait pas de film), la tête de train est atteinte, avec sa Machine. Évidemment tout ne se termine pas comme prévu (par les uns ou par les autres). La fin est un peu niaise, entre deux alternatives intéressantes, le scénario s’enfourche dans une troisième, plutôt pathétique : mais on pourra l’appeler la revanche des ours polaires, que l’on voit flotter stupidement à la télé sur leurs icebergs qui rétrécissent actuellement à vue d’œil, et dont l’un d’eux semble s’épanouir dans ce monde-là — ceci étant, les belles pentes de neige immaculées de la fin m’ont données des envies de ski à moi aussi. Mais jusque-là le film est très bien mené.
On passera sur les grossières erreurs de physique : la machine à mouvement perpétuel est impossible [3], pourquoi faut-il dire quelque chose à ce sujet surtout quand c’est faux — pour faire savant ? — plutôt que rien ?
Il est également impossible de déclencher une avalanche à grande distance simplement avec le bruit d’une explosion (son onde de choc acoustique), une surpression acoustique ne permet pas déclencher une avalanche de neige. J’avais déjà vu ça dans le gentillet (mais sympathique) Belle et Sébastien.
On peut aussi se poser des questions sur le prétexte : de la géo-ingénierie qui tourne mal. Pour refroidir la planète en balançant des trucs dans l’atmosphère, et pour ce que l’on en connaît, ce doit être des aérosols (c’est-à-dire des poussières microscopiques en suspension dans l’air), comme le fait une puissance éruption volcanique du style Pinatubo en 1991. Et pour que le refroidissement soit aussi rapide (on imagine que cela se passe sur une échelle de temps de quelques mois après l’épandage du mystérieux CW-7), il doit falloir en mettre une sacré quantité, bloquant rapidement totalement la lumière solaire, et encore, le temps nécessaire pour évacuer la quantité de chaleur qui permet à la Terre d’avoir sa douce température de 15°C en moyenne, à une température à laquelle toute vie serait impossible (du style bien inférieure à -80°C) doit probablement être en réalité plus long que quelques mois [4]... De surcroît, en 2031, quand on regarde par les fenêtres du train, on voit, outre de jolis paysages glacés et enneigés, un ciel bleu parfaitement clair. Donc soit les aérosols se sont « envolés » (redéposés sur Terre), ce qui expliquerait qu’à la fin du film on se rende compte que la planète devient à nouveau habitable. Soit le composé CW-7 n’est pas un aérosol et est transparent au rayonnement solaire. Mais dans ce cas, comment expliquer que la planète se refroidisse si la lumière solaire (qui est à l’origine de l’effet de serre permettant la vie) peut encore passer et atteindre sa surface ? Mystère...
Cette révolte de la base orchestrée d’en haut m’a fait penser à la bande dessinée « SOS Bonheur » qui date des années 1980, tout comme la bande dessinée qui est à l’origine de ce film. Le contexte est évidemment différent, mais finalement, n’est-ce pas la même conclusion : une société, quelque soit sa taille, a périodiquement besoin de révolutions pour garder sa stabilité... Ceci étant, le concept a ses limites, puisque, en l’occurrence, dans Snowpiercer, il échoue.
Le genre post-apocalyptique en lui-même fait référence à une multitude de films explorant les ravages d’une catastrophe provoquée par l’être humain ou pas si elle est naturelle, réduisant l’humanité à sa plus simple expression, et réduite à la survie. La série des Terminator exploite la thématique de la guerre (contre des robots devenus incontrôlables), Mad Max la fin d’un règne, celui du pétrole, qui entraîne le chaos, Le jour d’après (pas terrible de surcroît) une modification soudaine du climat mondial (avec, là-encore une belle caillante générale), Les fils de l’homme évoque la fin de l’humanité par son incapacité biologique à se reproduire...
Un film que j’ai vu récemment dans la même mouvance, exploite la thématique de l’épidémie incontrôlable, qui éradique sans pitié la quasi-totalité de la population, avant qu’une apocalypse nucléaire se déclenche inopinément afin de balayer une bonne partie des survivants (qui se trouvaient dans le froid Antarctique au moment de l’épidémie, mais qui ne vont pas échapper au feu nucléaire), avant de faire une happy-end sur une bande d’éclopés miraculés. Il s’agit de Virus du réalisateur japonais Kinji Fukasaku (1980), qui ne fut pas vraiment diffusé en salle à l’époque. Pourtant, je ne l’ai pas trouvé si mal que ça. Il est désormais dans le domaine public, on peut le regarder gratuitement et légalement en ligne.
Aller, je m’arrête là. Faites de beaux rêves...
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